dimanche 30 janvier 2011

Comment décidons-nous en situation complexe ?

Mes pérégrinations nomades (pléonasme?) m'ont emmené ce matin vers des terrains incertains et passionnants. Mon écran s'est tout à coup arrêté sur un article qui parlait de la prise de décision en situation complexe et urgente : un document de formation à destination des infirmiers urgentistes(1). Des mots affluent, étonnants : pensée inductive, pensée systémique, intuition, pensée hypothético-déductive, pensée dialectique et critique et pensée créatrice. Le processus de décision en situation urgente serait-il à l'opposé de la pensée unique ?
Pour analyser une situation complexe en vue d'un diagnostic et d'une action, les infirmiers urgentistes sont appelés à suivre deux modes opératoires parallèles :
- un mode dont le point de départ est la pensée inductive (observation de faits, de signes, perceptions) puis l'intuition et la pensée critique sont sollicitées
- un autre mode dont le point de départ est la pensée systémique (quels autres facteurs sont présents ?) puis la pensée déductive et l'expérience sont elles-mêmes sollicitées,
pour parvenir à un choix et donc une décision.

Le mode "multi-canal" de prise de décision semble être conseillé, mais que se passe-t-il en réalité ?

La même année, Jean-Fabrice Lebraty, professeur de sciences de gestion au CNRS, publie un article sur la prise de décision en situation complexe (2). Il fait référence à une expérience menée avec des décideurs, cadres pompiers dirigeant des unités d'intervention. Durant l'observation, il s'avère que la grande majorité des décisions (126 sur 157) ont été prises en n'explorant que la première idée imaginée par le décideur : pas de choix rationnel donc entre plusieurs options !! Et plus le cadre pompier était expérimenté, plus la tendance était forte.
En situation urgente et complexe, nous semblons donc réagir en hypertrophiant notre capacité d'observation pour la comparer aux autres situations vécues. Notre intuition se met en branle pour explorer une première option : nous nous projetons dans le proche avenir pour imaginer ce qui va se produire sur les étapes suivantes. Très vite si cette première option nous semble inappropriée, nous modifions notre première option pour en explorer une autre.

Nous fonctionnons donc de manière séquentielle en explorant d'abord le premier chemin que notre intuition nous propose en fonction de notre niveau de conscience de la situation (expérience, compréhension et projection dans le futur). Puis si les premières étapes ne nous semblent pas adaptées nous revenons vers une autre voie.

Pour mieux utiliser notre intuition en phase de décision, trois leçons nous sont utiles :
- que me dit mon expérience ? L'intuition, c'est d'abord de l'expérience
- que me dit mon émotion ? Désir et intuition doivent être séparées.
- que me disent mes croyances ? Nos croyances dictent nos comportements.

Alors devant une prise de décision, avant de commencer par analyser la situation de manière "objective", lorsque devant nous plusieurs chemins se profilent, commençons par regarder lequel de ces chemins est le plus "lumineux", celui vers lequel notre intuition nous emmène et explorons ce chemin, comme dans un labyrinthe complexe où nous passons notre temps à créer notre propre chemin.


(1)L'analyse des situations complexes dans un service d'urgence, de chirurgie ou de soins intensifs. Hôpital de Coimbra- Portugal- Oct 2007.
(2) http://www.educ-revues.fr/EM/AffichageDocument.aspx?iddoc=34437&pos=77


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