dimanche 31 octobre 2010

Les leçons des champions du changement

Être léger : le nomade part léger, il porte peu, garde l'essentiel, priorise en permanence en fonction du poids que cela représente pour lui. Légère la charge sur son dos, léger le poids dans sa tête. Pour changer, la charge que nous emportons est souvent trop lourde. Commençons par nous décharger de ce qui nous encombre inutilement.

L’espace est le temps : nomade, vous pensez espace-temps, comme si ces deux dimensions se rejoignaient. Pas seulement temps mais espace associé, pas seulement espace mais temps associé

Être invisible pour se protéger ; devenir invisible nous permet parfois de nous protéger dans un processus de changement comme le phasme qui devient invisible à ses prédateurs. Regardez les tentes des bédouins dans le désert ! Quand vous êtes en changement, comme vous êtes fragiles, protégez-vous ! Ne vous montrez pas trop !

Se retrouver et se ressourcer : Bouger c'est se retrouver face à soi et découvrir de nouvelles ressources pour avancer. Changer, ça "dégraisse" !

Être solidaire : l'accueil est une des valeurs communes à tous les champions du mouvement. Si vous êtes en train de changer, restez attentifs à ceux qui bougent aussi autour de vous ! Ils ont peut-être besoin de vous ...

Migrer pour trouver un climat plus agréable : une des préoccupations des gens en mouvement : l'environnement. Comme ces migrateurs qui recherchent un climat plus favorable, mettez vous en quête de ce qui favorise votre épanouissement.

Accepter de se perdre et en faire un jeu : ce picotement de ne pas savoir où l'on va.. acceptez-le comme un jeu et prenez-le comme tel. Si vous vous perdez vous allez vous retrouver...

Savoir se repérer : un nomade développe une attention particulière à ce qui l'entoure. Ce qu'il traverse représente pour lui une expérience. Bonne ou mauvaise, il devra s'en resservir plus tard. Prenez vos repères pour changer, pour ne pas vous retrouver dans le vide. Recréez votre nouvel environnement.

Rester sur ses gardes : en changement nous sommes fragiles. Nous devons rester sur nos gardes. Les sédentaires peuvent nous en vouloir, nous jalouser, alors, ils peuvent nous nuire.

Faire confiance à son intuition : intuition et changement sont intimement liés. Développez votre intuition, faites-lui confiance, faites-vous confiance !

Changer pour apprendre et progresser : ceux qui bougent apprennent tous les jours et progressent plus vite que ceux qui ne bougent pas. Le monde est si vaste et il a tant à nous apprendre : monde géographique ou historique, monde spirituel ou scientifique, monde d'aujourd'hui ou de demain.

Savoir affronter la solitude : changer est un acte solitaire. L'accepter c'est l'adopter !

Être conscient: conscience et changement se tiennent la main. Sans conscience, pas de mouvement. "Le simple regarde le doigt quand on lui montre l'étoile"

La naissance du papillon est la mort de la chenille : le premier pas vers le changement peut représenter notre propre mort. Mais n'est-ce pas ça la nouvelle vie ?

Se perdre pour mieux se retrouver pour devenir qui nous sommes et finalement

S’envoler


lundi 25 octobre 2010

Retour au Ladakh, auprès des victimes des inondations. LeMonde.fr

Un conte sur le changement : "Le pèlerin, le phasme, la cigogne, le moustique et le papillon". Dernier épisode

La lumière du jour et les bruits des randonneurs réveillèrent doucement notre pèlerin. Il se prépara rapidement et reprit sa route après avoir salué chaleureusement ses hôtes.
Du vallon dans lequel était niché l’abri dans lequel il avait passé la nuit, le chemin qu’il avait décidé d’emprunter remontait doucement vers une belle forêt. Il prit son temps pour profiter pleinement de sa promenade en levant les yeux vers le faîtage des grands arbres qui l’entouraient. Aussi loin qu’il portait son regard, il ne voyait que du vert et du brun, des rais de lumière venant illuminer les clairières comme des projecteurs de scène. A tout moment, il s’attendait à voir surgir une fée magnifique sur sa blanche licorne.
La tête encore dans ses rêves, le marcheur ne se rendit pas compte que quelqu’un l’observait : un papillon s’était posé sur son épaule.
- Bonjour, dit-il.
Le pèlerin sursauta. Le papillon lui avait parlé très près de son oreille. Il tourna la tête et vit le magnifique insecte. Ses ailes bleues et mauves battaient doucement.
- Bonjour, répondit-il. Vous m’avez fait peur vous savez ? Vous pourriez prévenir !
- Je suis navré, cher Monsieur. Ce n’était pas mon intention.
- Je vais en profiter pour faire une petite pause, proposa le pèlerin, en visant une grosse pierre sur laquelle il pourrait s’asseoir.
Le papillon prit son envol pour laisser au marcheur le soin de poser son sac, puis il se reposa sur sa main.
- Vous permettez ? fit le papillon
- Avec plaisir, répondit-il avant de dire au papillon. Depuis hier, je rencontre beaucoup de gens qui me posent toujours la même question. Alors je pense que vous aussi vous allez me demander pourquoi je marche ?
- Heu ! A vrai dire, ce n’était pas tout à fait la question que j’envisageais de vous poser, mais on peut commencer par celle-là, si vous voulez.
- Avant de répondre, et comme vous êtes vous aussi un champion du changement, j’aimerais vous poser une question : qu’est-ce qui vous amène à passer d’un état de chenille à un état de papillon ?
Le papillon regarda l’homme un peu surpris.
- Je ne comprends pas ce que vous dites. Je suis et j’ai toujours été un papillon.
- Mais non, rétorqua l’homme, avant d’être un papillon vous étiez une chenille, vous ne le saviez pas ?
- Je sais seulement que je suis sorti d’un cocon et que je me suis envolé, fit l’insecte qui ne comprenait toujours pas ce que l’homme bizarre lui racontait.
- Bon, ce n’est pas grave ! Laissez tomber !
- Ah ! Mais non, vous n’allez pas vous en tirer comme ça ! Expliquez-moi ! Que voulez-vous dire ? se mit en colère le papillon.
- Très bien, très bien. Je vais vous expliquer, dit le pèlerin doucement pour calmer l’animal. Vous êtes un insecte appelé lépidoptère dont la forme adulte est appelée papillon. Vous pondez des œufs qui donnent naissance à des larves, qui deviennent chenilles puis papillons.
Le papillon, incrédule, regarda l’homme fixement et lui dit :
- J’étais une chenille, moi, avant ?
- Oui, comme tous vos congénères. Et c’est étonnant de voir cette magnifique mutation, dit le pèlerin admiratif.
- Et bien, vous venez de m’apprendre quelque chose d’incroyable et d’essentiel pour moi. Je vous remercie. Je vais surement mettre du temps pour admettre cela mais je réagirai différemment quand je rencontrerai une chenille.
- La conscience est maintenant votre amie la plus sure, dit le marcheur à son nouvel élève. Et puis, vous savez pour vous, votre changement d’état était une naissance alors que pour la chenille que vous étiez, c’était la mort !
- Décoiffant comme une bourrasque en haut d’un chêne ! Je vais y réfléchir. Alors, revenons à notre première question. Qu’est-ce qui vous fait marcher, Monsieur ?
- Et bien, ce que nous venons de dire m’a permis de réfléchir. Je pense au fond que je marche pour me perdre et ainsi mieux me retrouver. C’est ça ! pour devenir qui je suis, continua le pèlerin qui semblait avoir découvert quelque chose de très important pour lui.
- Alors, j’ai une dernière question, lança le papillon tout joyeux.
- Allez-y, je vous en prie.
- Et vous ? Pourquoi ne volez-vous pas ?
Et le papillon s’envola guilleret en laissant l’homme tout étonné avec ses leçons et sa question sans réponse… pour l’instant.

dimanche 17 octobre 2010

Le pèlerin, le phasme, la cigogne, le moustique et le papillon- 3ème épisodeUn conte sur le changement-

La nuit tombait et le pèlerin hâta le pas vers un vallon qu’un marcheur lui avait indiqué et où, lui avait-il dit, il trouverait un abri confortable. Une fois arrivé, l’accueil qu’il reçut le réconforta : l’endroit tenait ses promesses. Toutefois et sans savoir pourquoi, ses sens se mirent aux aguets. Il s’installa dans le gîte, prit une douche et attendit que le repas fut servi, en repensant à sa journée. Il prit note dans son carnet de ces quelques mots :

L’espace est le temps, être léger, être invisible pour se protéger, se retrouver et se ressourcer, être solidaire, migrer pour trouver un climat plus agréable, accepter de se perdre et en faire un jeu, savoir se repérer.

- Belles leçons ! se dit-il.

Une cloche se fit entendre pour signifier aux marcheurs que le repas était servi. Plus de dix convives se rassemblèrent autour de la table. La nourriture était bonne et abondante. Les discussions s’entrechoquaient. Les rires fusaient. L’ambiance devenait pourtant électrique mais, il semblait que personne ne s’en apercevait. Tout à coup, un orage éclata. D’un bond, notre pèlerin fut debout. Il fonça au premier étage où il avait laissé ses affaires. Il surprit un des convives en train de fouiller dans son sac.

- Que faites-vous là ? lança-t-il

L’autre, sans attendre, lâcha tout et partit en courant. Il le poursuivit jusque dehors où la pluie commençait à tomber fort. Le voleur disparut dans la nuit.

- Être sur ses gardes reste une qualité indispensable lorsqu’on n’est pas chez soi, n’est-ce pas ?

Quelqu’un dans le noir lui avait lancé cette question, comme s’il savait ce qu’il s’était passé depuis le début de la soirée. Le pèlerin orienta le faisceau de sa lampe vers le coin de la pièce d’où provenait la voix. A sa grande surprise, il ne vit personne. Il mit cette hallucination sur le compte de la fatigue et alla se coucher. Dès qu’il éteignit la lumière, il entendit le bruit caractéristique d’un moustique. Après plusieurs tentatives pour tuer le dérangeur, il entendit la même voix lui dire dans le noir ;

- Être sur ses gardes reste une qualité indispensable, vous ne trouvez pas ?

- Vous voulez parler de vous ou de moi ? s’entendit-il répondre

- De vous, de moi, de tout le monde, dès lors qu’on n’est pas chez soi, répondit la voix.

- C’est vrai ! D’ailleurs tout à l’heure, heureusement que j’étais sur mes gardes ! Encore un peu, et je me faisais voler !

- Et moi, heureusement que j’étais sur mes gardes, sinon c’est vous qui m’écrasiez contre votre épaule !

Le moustique lui adressait la parole. Notre homme, interloqué chercha à en savoir plus.

- Et pourquoi vous me dites ça ? lui dit-il

- Seulement pour discuter un peu. On n’a pas toujours l’occasion de discuter avec un spécialiste de la mobilité et de l’adaptation.

- Ah bon ? Je suis un spécialiste de la mobilité et de l’adaptation ?

- Bien sûr. Vous bougez tous les jours et vous devez vous adapter en permanence. Et moi aussi.

- Expliquez-moi ça ! fit le pèlerin.

- Savez-vous que nous sommes les champions de l’adaptation aux produits insecticides que les services sanitaires essaient de mettre au point pour lutter contre nous ? Nous nous adaptons très vite en opérant des mutations.

- Et vous faites ça pour ne pas mourir n’est-ce pas ?

- Bien sûr, mais pas seulement.

- Là, vous m’intéressez beaucoup, cher ami moustique ! Et pour quoi d’autre alors ?

- Pour progresser bien sûr ! Jour après jour, épreuve après épreuve, dès que nous résistons en mutant, nous apprenons et en apprenant, nous progressons.

Le pèlerin hocha de la tête en s’exclamant :

- Moi aussi, je fais ça quand je marche, bien sûr. J’apprends tous les jours de mes épreuves.

- N’est-ce pas ? dit le moustique

- C’est une belle leçon que vous venez de me donner là ! Merci beaucoup, fit l’homme.

- Et vous, que pouvez-vous m’apprendre sur l’adaptation pour que je progresse encore? s’amusa le moustique.

L’homme réfléchit et prit un air grave.

- S’adapter, c’est aussi affronter la solitude. Je crois que modifier sa manière de faire est un acte très solitaire. Nous nous retrouvons tous face à nous-mêmes à l’heure du changement.

Le moustique en resta coi, leva les yeux au ciel en marque de réflexion, puis hocha sa trompe en signe d’approbation.

- C’est bien vrai ce que vous venez de dire là, Monsieur ! lança l’insecte. Cela va nourrir ma nuit plus que l’hémoglobine dont je vous aurais volontiers prélevé un petit échantillon. Je vous souhaite un sommeil réparateur, cher pèlerin !

Notre homme entendit le moustique quitter la chambre. Avant de s’endormir, il prit son carnet et inscrivit ces mots à la suite de ceux qu’il avait écrits tout à l’heure :

Rester sur ses gardes, faire confiance à son intuition, changer pour apprendre et progresser, savoir affronter la solitude : changer est un acte solitaire.

Satisfait, il éteignit la lumière et s’endormit très vite.

dimanche 10 octobre 2010

Le pèlerin, le phasme, la cigogne, le moustique et le papillon; un conte sur le changement- 2ème épisode

Quelques heures après, le pèlerin traversait un grand pâturage : les parcelles étaient séparées de petits murets de pierres sèches et de loin cela ressemblait à un grand jeu de tangram résolu. Le temps était frais et le soleil éclairait les couleurs de l’automne pour les rendre plus éclatantes encore. Face à lui, haut dans le ciel, il vit arriver un vol d’oiseaux qu’ils ne savaient pas encore distinguer. Ils étaient trois, formant un triangle magnifique, grands oiseaux battant de leurs grandes ailes le grand air qui les portait. Le pèlerin reconnut alors des cigognes qui fonçaient à grande allure vers le sud. Perplexe, il les vit alors opérer un virage au-dessus de lui. En trois grands cercles, les oiseaux avaient atterri à cinquante mètres devant lui. Il s’approcha doucement craignant de les effrayer.
Une des cigognes, fit alors de sa fière démarche, quelques pas vers lui, et levant son bec, fit :

- Qui êtes-vous marcheur ?

- Et vous donc, voleuses ! fit le pèlerin en riant. Je plaisante ! Ne le prenez pas mal ! Je suis un pèlerin. Je vais où le chemin me mène. Et vous, vous allez où le vent vous porte ?

- C’est à peu près ça, oui. Le vent nous mène au sud. Nous allons chercher un climat plus clément, comme chaque année. Il commence à faire trop froid ici.

- C’est donc la seule raison qui vous fait faire ces milliers de kilomètres ? demanda le pèlerin, se rappelant du phasme qui avait découvert une autre raison à son camouflage.

- Et bien, oui, pour quelle autre raison à votre avis ? Et, puis, nous serions curieuses de savoir ce qui vous fait donc marcher ? dit la cigogne en se retournant vers ses congénères pour chercher leur approbation.

- Et bien, il y a une raison que j’ai découverte tout à l’heure. Je marche pour être léger. Si je suis lourd, je ne peux pas marcher. Vous le savez aussi ; si vous êtes alourdies, vous volez moins facilement, n’est-ce pas ?

- Bien sûr ! Quand nous avons un long trajet, à faire, nous prenons garde à ne pas trop manger ! Hein, les filles ?

Les cigognes approuvèrent du bec en plissant les yeux.

- La deuxième raison qui me fait marcher, en y réfléchissant, c’est que j’y trouve de la solidarité. Les gens sur le chemin sont gentils. Si vous avez un problème, ils vous proposent tout de suite leur aide.

Les cigognes se regardèrent et un des oiseaux qui n’avaient pas pris la parole s’avança vers le pèlerin.

- Votre réponse nous fait penser à une anecdote qui nous est arrivée.

- Ah bon ? Racontez, racontez ! Ca m’intéresse !

- Un jour de notre dernière migration, nous avons pensé être perdues. Nous ne reconnaissions plus notre route, nos lieux habituels de repos avaient disparu !

- C’est affreux de se sentir perdu comme ça ! remarqua le pèlerin. Ca m’est déjà arrivé !

- Oui, dans un premier temps, c’est vrai ! Et puis, avec mes amies, au lieu de nous angoisser, nous avons décidé de trouver ça amusant ! Alors, nous avons joué à celle qui trouverait la première un nouvel abri.

Les deux amies de la cigogne rirent de bon cœur en se souvenant de ce moment, et la troisième, celle qui n’avait pas encore parlé, dit ;

- Oui et c’est moi qui ai gagné ! Je nous ai trouvé un endroit adorable. Des gens avaient préparé des nids très douillets pour les cigognes de passage. Nous faisons maintenant à chaque fois le détour pour nous y arrêter ! fit-elle très fière d’elle.

- Magnifique leçon d’accueil et de solidarité ! répliqua le pèlerin. Et puis en plus, accepter de se perdre, savoir en faire un jeu et savoir se repérer : ça, j’essaierai de m’en souvenir ! Merci beaucoup !

- Je vous en prie. Nous avons été heureuses de vous rencontrer. Nous avons bien fait de nous arrêter. Belle leçon aussi pour nous. Nous allons reprendre notre route. Notre voyage est loin d’être terminé ! Et puis, l’est-il vraiment un jour ? dit la cigogne en clignant de l’œil vers le pèlerin amusé.

- Bon voyage ! fit chaleureusement le pèlerin alors que les trois oiseaux migrateurs prenaient leur envol.

dimanche 3 octobre 2010

Le pèlerin, le phasme, la cigogne, le moustique et le papillon- 1er épisode

Un pèlerin, sac au dos, chapeau sur tête et tête dans les étoiles, marchait seul depuis longtemps. L’espace était devenu son temps. « A quelle heure suis-je parti ? » «A quelle heure devrais-je arriver si je continue à cette allure ? Et combien de temps encore avant la nuit ? ». Le temps lui filait entre les doigts alors qu’il embrassait l’espace de tout son corps.

Parti à l’assaut d’une colline qui lui semblait sans fin, il repéra une souche accueillante à l’ombre d’un grand chêne. Il posa son sac sur le sol, son chapeau sur la souche et son regard sur une curieuse brindille qui dépassait d’une pierre recouverte de mousse. Il avança la main et la brindille se mit à bouger. Surpris, le pèlerin fit un brusque mouvement de recul

- Mais qu’est-ce que c’est ?, dit-il.

- On ne dit pas « Qu’est-ce que c’est ? » d’un être vivant, Monsieur, mais « Qui êtes-vous ? »… Alors, pour répondre à cette deuxième question, je vais me présenter. Je suis un phasme. Non, non pas un fantasme, un phasme !

Le pèlerin ahuri, écarquillait les yeux pour savoir d’où venait cette voix. Le phasme avait bougé et s’était fondu dans la branche sur laquelle il se trouvait maintenant, juste à côté de la pierre, pas très loin de la souche sur laquelle se trouvait le chapeau du pèlerin.

- Mais qui parle ? dit le pèlerin

- Monsieur, j’aimerais que vous me promettiez quelque chose avant de me montrer ! dit le phasme

- Oui ! Bien sûr ! répondit le pèlerin

- Promettez-moi d’abord de ne rien me faire !

- Je m’y engage si tu fais de même.

- Très bien, je m’y engage aussi ! Et j’ai une autre demande, tenta le phasme.

- Laquelle ? interrogea le marcheur un peu impatient.

- Je voudrais savoir ce qui vous fait marcher !

- Je vais essayer ! dit le pèlerin, un peu pris de court, n’ayant pas beaucoup réfléchi à ça. Mais alors à une condition !

- Laquelle ? dit le phasme

- Que vous me disiez ce qui vous fait vous cacher !

- D’accord ! répondit le phasme, sûr de lui.

Fin de négociation. Le phasme bougea lentement et se mit à marcher en vibrant vers la pierre recouverte de mousse. Le pèlerin le découvrit alors : il se frotta les yeux pour être sûr de ne pas rêver. Une brindille vivante !

- Alors, maintenant que je me suis mis à découvert, dites-moi, ce qui vous fait marcher, pèlerin !

Le pèlerin réfléchit et avança.

- Ce que j’aime quand je marche, c’est que je me sens léger. Il y a dans la marche une légèreté d’être qui rappelle à chaque pas combien il est important de ne porter sur soi que ce qui est indispensable. Voilà pourquoi je marche, je crois : pour découvrir en moi ce qui est essentiel.

Le pèlerin était content de ce qu’il venait d’exprimer. Il baissa les yeux vers le phasme et lui demanda ;

- A vous maintenant ! Alors, qu’est ce qui vous fait vous cacher ?

- Ce que vous venez de me dire m’a permis de réfléchir. Ma première réponse, je l’avais déjà en tête quand vous m’avez posé la question tout à l’heure. Vous m’avez vu marcher ? On ne peut pas dire que je sois un champion de la course à pattes. Mon camouflage me permet évidemment de ne pas être mangé tout cru par les oiseaux. Mais je pense qu’il y a une autre raison à cela.

- Ah oui ? Et laquelle ? demanda le pèlerin.

- Je pense que quand je suis invisible, ça me permet aussi de rester très longtemps seul avec moi-même et je me rends compte que ça me fait vraiment du bien, répondit le phasme, tout étonné de sa propre découverte.

- Ca, c’est une belle leçon ! Je pense aussi que je marche pour me ressourcer et me retrouver. Merci, cher ami. Je vais vous souhaiter une belle continuation. Je vais continuer mon chemin.

Suite au prochain épisode