lundi 25 octobre 2010

Un conte sur le changement : "Le pèlerin, le phasme, la cigogne, le moustique et le papillon". Dernier épisode

La lumière du jour et les bruits des randonneurs réveillèrent doucement notre pèlerin. Il se prépara rapidement et reprit sa route après avoir salué chaleureusement ses hôtes.
Du vallon dans lequel était niché l’abri dans lequel il avait passé la nuit, le chemin qu’il avait décidé d’emprunter remontait doucement vers une belle forêt. Il prit son temps pour profiter pleinement de sa promenade en levant les yeux vers le faîtage des grands arbres qui l’entouraient. Aussi loin qu’il portait son regard, il ne voyait que du vert et du brun, des rais de lumière venant illuminer les clairières comme des projecteurs de scène. A tout moment, il s’attendait à voir surgir une fée magnifique sur sa blanche licorne.
La tête encore dans ses rêves, le marcheur ne se rendit pas compte que quelqu’un l’observait : un papillon s’était posé sur son épaule.
- Bonjour, dit-il.
Le pèlerin sursauta. Le papillon lui avait parlé très près de son oreille. Il tourna la tête et vit le magnifique insecte. Ses ailes bleues et mauves battaient doucement.
- Bonjour, répondit-il. Vous m’avez fait peur vous savez ? Vous pourriez prévenir !
- Je suis navré, cher Monsieur. Ce n’était pas mon intention.
- Je vais en profiter pour faire une petite pause, proposa le pèlerin, en visant une grosse pierre sur laquelle il pourrait s’asseoir.
Le papillon prit son envol pour laisser au marcheur le soin de poser son sac, puis il se reposa sur sa main.
- Vous permettez ? fit le papillon
- Avec plaisir, répondit-il avant de dire au papillon. Depuis hier, je rencontre beaucoup de gens qui me posent toujours la même question. Alors je pense que vous aussi vous allez me demander pourquoi je marche ?
- Heu ! A vrai dire, ce n’était pas tout à fait la question que j’envisageais de vous poser, mais on peut commencer par celle-là, si vous voulez.
- Avant de répondre, et comme vous êtes vous aussi un champion du changement, j’aimerais vous poser une question : qu’est-ce qui vous amène à passer d’un état de chenille à un état de papillon ?
Le papillon regarda l’homme un peu surpris.
- Je ne comprends pas ce que vous dites. Je suis et j’ai toujours été un papillon.
- Mais non, rétorqua l’homme, avant d’être un papillon vous étiez une chenille, vous ne le saviez pas ?
- Je sais seulement que je suis sorti d’un cocon et que je me suis envolé, fit l’insecte qui ne comprenait toujours pas ce que l’homme bizarre lui racontait.
- Bon, ce n’est pas grave ! Laissez tomber !
- Ah ! Mais non, vous n’allez pas vous en tirer comme ça ! Expliquez-moi ! Que voulez-vous dire ? se mit en colère le papillon.
- Très bien, très bien. Je vais vous expliquer, dit le pèlerin doucement pour calmer l’animal. Vous êtes un insecte appelé lépidoptère dont la forme adulte est appelée papillon. Vous pondez des œufs qui donnent naissance à des larves, qui deviennent chenilles puis papillons.
Le papillon, incrédule, regarda l’homme fixement et lui dit :
- J’étais une chenille, moi, avant ?
- Oui, comme tous vos congénères. Et c’est étonnant de voir cette magnifique mutation, dit le pèlerin admiratif.
- Et bien, vous venez de m’apprendre quelque chose d’incroyable et d’essentiel pour moi. Je vous remercie. Je vais surement mettre du temps pour admettre cela mais je réagirai différemment quand je rencontrerai une chenille.
- La conscience est maintenant votre amie la plus sure, dit le marcheur à son nouvel élève. Et puis, vous savez pour vous, votre changement d’état était une naissance alors que pour la chenille que vous étiez, c’était la mort !
- Décoiffant comme une bourrasque en haut d’un chêne ! Je vais y réfléchir. Alors, revenons à notre première question. Qu’est-ce qui vous fait marcher, Monsieur ?
- Et bien, ce que nous venons de dire m’a permis de réfléchir. Je pense au fond que je marche pour me perdre et ainsi mieux me retrouver. C’est ça ! pour devenir qui je suis, continua le pèlerin qui semblait avoir découvert quelque chose de très important pour lui.
- Alors, j’ai une dernière question, lança le papillon tout joyeux.
- Allez-y, je vous en prie.
- Et vous ? Pourquoi ne volez-vous pas ?
Et le papillon s’envola guilleret en laissant l’homme tout étonné avec ses leçons et sa question sans réponse… pour l’instant.

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