mercredi 25 juillet 2012

En avant, Route !

LA RAGE DE FUIR
Et tu marchais. Pour partir, marcher, il faut de la colère. Cela ne vient pas du dehors. Pas marcher comme un appel du large, une promesse de vérité ou la ten-tation du trésor. Mais plutôt d’abord cette rage intérieure. Au creux du ventre la douleur d’être ici, l’impossibilité à demeurer en place, à s’enterrer vivant, à rester simplement. Il fait mauvais chez vous, écrivait-il depuis les montagnes du Ha-rar. Chez vous, les hivers sont trop longs et les pluies sont trop froides. Mais enfin là, vers chez nous, en Abyssinie, c’est impossible aussi cette misère et cet ennui, cette immobilité lasse : rien à lire, personne à qui parler, rien à gagner. Ici, c’est impossible. Impossible ici un jour de plus. Ici, c’est « atroce ». Il faut partir. « En avant, route ! » Toute route bonne à prendre, tout chemin vers le soleil, vers plus de lumière, d’aveuglement sourd. Ce n’est sans doute pas mieux ailleurs, mais c’est au moins loin d’ici. Il faut la route, pour s’y rendre. « Les poings dans mes poches crevées ». Il n’y a que sur la route vraiment, sur les sentiers, sur les chemins que ce n’est pas ici.
Au revoir ici, n’importe où.

Arthur Rimbaud

Marcher, une philosophie.

samedi 21 juillet 2012

Emotions à fleur de peau, fleur de sel, sel de vie, sel de mort

J'ai l'émotion tellement à fleur de peau, tellement à fleur de sel, plaie ouverte sur le sel de la vie, le sel de la mort. Toutes les sollicitations, tous les souvenirs, toutes les musiques, toutes les images, toutes les mémoires du temps ne sont que l'occasion pour la vague énorme de faire sentir sa force, pour le sel de faire sentir sa piqûre. Ce sont les fleurs qui remontent, pas la vase. L'émotion : un vase pour ces fleurs de l'éternel souvenir de lui.

mercredi 18 juillet 2012

Lettre à mon fils : parce que la mort d’un enfant est ….


Je suis là,  à cet endroit que j’aurais tant aimé que tu connaisses. J’avais imaginé en décembre dernier que toi,  ta femme et tes deux merveilles pourraient y passer un peu de temps au détour d’un passage après  la presqu’ile  du Cotentin. C’est un endroit que tu aurais aimé, je le sais. Au creux des vents, des courants forts, des musiques de marins que tu aimais tant.
Le deuil d’un enfant n’est pas seulement injuste et contre-nature. Il représente un obstacle quotidien comme pour sa femme ou ses filles ou tous ses proches,  d’un deuil du futur, juste impossible à faire. Et pourtant, il faut vivre, et pourtant il faut continuer, parce que c’est notre vie, parce que c’était son chemin. Et que  son chemin est le nôtre et que tous les jours, il est avec nous. Je lui envoie un message de lumière pour qu’il nous fasse confiance pour arriver à vivre cette épreuve.
Je reprends là les mots d’un père célèbre qui a perdu son fils. Quand on perd un mari ou une épouse on est veuf ou veuve, quand  on perd ses parents, on est orphelin. Il n’existe pas de mot pour désigner les parents qui ont perdu leur enfant. Pourquoi ?