dimanche 13 juin 2010

Immobiliser un nomade n'est pas une sinécure


Je sors de trois semaines d'immobilisation contrainte et d'une semaine de remise en mouvement progressive : une opération m'y a obligé. Ce matin, pour la première fois, j'ai refait une marche de 2 heures sur une boucle que je connais bien. A cette occasion, comme c'est à chaque fois le cas, mon esprit vagabonde et s'accroche à des pensées imprévues. Je me disais donc en marchant ce matin, que l'immobilisation avait d'abord créé chez moi de la contrariété : comment allais-je faire pour annuler ou reporter tous mes engagements ? Puis, la douleur m'a demandé une économie de mouvements pour les rendre les plus efficaces possibles : ni faux ni inutiles. Je me suis centré sur mon corps. En même temps, mon esprit est parti en vagabondage sur la toile : je passais mes journées sur internet, je continuais à travailler à distance, bien sûr (chuuut) et je "labyrinthais" gaiement, comme un remède à mon immobilisme. Au bout de la troisième semaine, je me sentais bizarrement moins bien, la douleur diminuant mais la vitalité aussi. L'énergie qui m'était nécessaire pour accomplir des tâches basiques me décourageait. La fin de l'arrêt de travail approchait et plus il approchait plus j'étais angoissé : je craignais vraiment ne pas pouvoir reprendre.
J'ai repris le travail avec un effort qui m'a couté. Et au bout d'une semaine, me voilà reparti à faire du tennis, à pourvoir remarcher longtemps et à assurer le quotidien.
Ce constat ce matin a fait naître chez moi trois réflexions :
- un nomade arrêté continue à être un nomade de l'esprit ; on peut donc continuer à rester connecté et libre même stoppé dans son intégrité physique (et je mesure l'écart qu'il peut y avoir entre ce que j'ai vécu et des cas beaucoup plus graves et handicapants : mais je crois cela possible malgré tout)
- quelqu'un qui s'est enferré dans la sédentarité croit qu'il ne pourra pas en sortir : du coup, les premiers mouvements sont douloureux et ressentis comme risqués. Nous devons donc aider les gens à aller vers les changements, comprendre leurs peurs et leur dire que les premiers pas seront difficiles. Je vous conseille vivement la lecture du livre "Qui a piqué mon fromage" de Johnson Spencer qui décrit ce phénomène de manière très ludique par une métaphore très inspirante.
- quelqu'un qui se remet en mouvement a besoin de repères solides : ce matin, j'ai repris une boucle que j'ai du faire quatre fois. Si j'avais expérimenté un nouvel itinéraire, j'aurais pris des risques supplémentaires inutiles et dangereux.
L'accompagnement (ou l'auto accompagnement) du changement passe aussi par ces prises de conscience.

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