Un monsieur passe dans l’allée centrale, en
nage, traînant sa valise, au téléphone, énervé. Il parle arabe
et français, un savant mélange des deux langues. On capte quelques mots. On
comprend qu'il s'agit de sa femme au téléphone. Il dit en
raccrochant "Elle va réussir à rater le train". Coup de sifflet,
portes qui se ferment, le monsieur revient dans la voiture, parlant fort, sa
femme le suit. Elle a finalement réussi à sauter dans le train.
Ils s’assoient face à moi. Ils se calment, se sourient, s'embrassent
tendrement et pudiquement. La femme s'endort.
Son téléphone n’arrête pas de sonner. Celui de l'homme aussi.
J'échange des regards avec l'homme, des coups de fil nombreux, je comprends
qu'ils vivent un décès. Arrivés à Lyon, regard implorant de l'homme vers moi.
Il dit "Je peux pas y croire" et fond en larmes. Je le prend dans mes
bras. Je lui dis "J'ai perdu mon fils il y a un an et demi. On y arrive.
C'est dur, mais on y arrive". Sa femme "Tu vois. Tu peux trouver du
réconfort avec d'autres personnes. Merci Monsieur". Il pleure. Il me prend
la tête. Il m'embrasse sur le front. Je pleure.
Il avait perdu son père le matin même.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire