La princesse, la poupée et la sirène
- J’ai faim, fit la poupée
- Oui, moi aussi, fit la princesse. Je ne sais
pas ce qu’on pourrait manger ici. Il n’y a que des feuilles et des herbes. On
pourrait peut-être pécher ? Qu’est ce que tu en dis ?
- Du poisson, le matin ? répliqua la
poupée avec un air effaré.
- Ça serait amusant. Attends, tu vas voir.
Elle revint en courant vers
la barque où la poupée sagement faisait des ronds dans l’eau avec sa main
par-dessus le bord de la barque. Cela faisait pencher la barque et la princesse
eut peur en voyant l’embarcation ainsi dangereusement versée sur le côté.
- Fais attention ! Ne te penche pas trop !
Tu risques de faire chavirer la barque ! cria la princesse à sa sœur.
La poupée sursauta,
surprise par le cri de sa sœur, toute hypnotisée qu’elle était par les dessins
que sa main faisait faire à l’eau calme sur ce méandre de la rivière.
- Tu m’as fait peur, grogna la poupée. Qu’est-ce
que tu as trouvé ?
- Des cannes à pêches pour pêcher des
grenouilles, affirma fièrement la princesse
- Des grenouilles ? Beurk ! Je ne
mangerai pas de grenouilles, moi.
- Si on n’a que ça à manger, tu seras bien
obligée, rétorqua la princesse
Elle finit de préparer les
cannes en accrochant au bout de la liane des lambeaux de foulard rouge qu’elles
avaient déchirés. Elle en remit une à sa sœur et lui dit :
- Allez viens avec moi. On va chercher des
coins à grenouilles.
Elles descendirent toutes les
deux sur la berge et remontèrent la rivière à la recherche d’endroits plus
riches en plantes aquatiques. La princesse savait que les grenouilles aimaient
bien se cacher dessous. Elles repérèrent un endroit propice et s’assirent sur
le bord de la rivière et laissèrent tremper leur ligne dans l’eau. Les yeux
rivés sur le bout de leur ligne, elles attendaient patiemment. Au bout de
longues, longues minutes, ne voyant rien bouger, les deux petites filles désespérèrent
un peu.
Tout à coup, la ligne de la
poupée bougea. Stupéfaite, la poupée tressaillit : sa ligne s’enfonçait
sous l’eau. Elle avait du mal à la retenir. Elle relevait la canne et ça
devenait plus facile. Puis, elle s’enfonçait encore. Au bout de quelques
tentatives pour faire sortir ce qu’elle pensait être une grenouille, la ligne
ne fit plus de résistance. Mais, au lieu d’une grenouille, c’était autre chose
qui était en train de sortir de l’eau ; une main, oui, une main qui tenait
le foulard rouge et qui était en train de sortir de l’eau.
- N’ayez surtout pas peur, petites filles
!
- Mais c’est toi qui a parlé ? demanda la
princesse
- Oui, c’est moi. Mais ne soyez pas effrayées.
Je ne suis pas méchante et je ne vous veux aucun mal, au contraire.
- Et qu’est-ce que tu fais dans l’eau
- Je suis une sirène, répondit la dame, moitié
poisson, moitié humaine.
- Une sirène ? Mais les sirènes vivent
dans la mer. Et là, tu es dans une rivière…, dit la poupée
- Oui, c’est vrai, mais parfois, je remonte le
cours de la rivière un peu. Nous ne sommes pas loin de la mer ici tu sais ?
Et puis, je suis une sirène un peu spéciale.
- Tu veux dire que tu es comme ton copain le pingouin ?
dit la princesse en se souvenant de ce que leur avait dit le pingouin qui leur
avait donné les cadeaux. (La princesse, la poupée et le pingouin)
- Oui, c’est ça. Et puis, je vous suis depuis
hier. Et j’ai pensé que ce matin vous auriez un peu faim. Alors je vous ai
préparé une surprise.
- Ouiiiiii firent les deux sœurs en tapant
dans leurs mains
- Venez ! Remontez dans votre barque. Je
vais vous remorquer jusque vers l’endroit où j’ai préparé votre déjeuner.
Les petites filles
coururent à la barque et sautèrent à l’intérieur. Le sirène enfila sur son
épaule la corde qui servait à retenir le bateau sur le bord et commença à
nager. D’abord, lentement, puis de plus en plus vite.
- Tenez-vous bien ! Je vais aller encore
plus vite. Vous voulez ?
- Ouiiiii firent les deux sœurs en tapant dans
leurs mains.
La barque accéléra, les
deux sœurs se tenaient bien aux rebords pour ne pas tomber. Elles riaient de
bon cœur lorsque le bateau faisait parfois des bonds. La sirène diminua son
allure à l’approche d’une clairière en bord de rivière.
- Voilà, vous pouvez descendre, lança la sirène
une fois la barque assez proche du bord pour que les petites filles en
descendent sans danger. Regardez ce que je vous ai préparé, juste là, à côté de
ce grand saule pleureur.
Les enfants découvrirent
alors avec bonheur une grande nappe sur laquelle était déjà installse de grands
plats remplis de croissants, de gâteaux et de friandises. La sirène, à ce moment-là
tapa dans ses mains, et, apparut alors de derrière les arbres une cohorte de
tout petits hommes, des lutins, qui transportaient un repas de fête : du
lait, du chocolat, des fruits, des laitages, du pain, du beurre et des jus de
fruits. Tout cela sur un grand plateau qu’ils déposèrent sur la grande nappe
blanche. Les deux sœurs affamées se jetèrent joyeuses sur ce festin imprévu. Pendant
ce temps, la sirène toute joyeuse aussi leur offrit un spectacle de sauts
hallucinants : elle plongeait puis jaillissait de l’eau, tournoyait en l’air
et retombait en faisant de grosses éclaboussures. Cela faisait beaucoup rire la
princesse et la poupée.
Après avoir avalé la
totalité de ce que les lutins leur avaient apporté, le ventre bien rempli, les
petites filles se reposèrent un peu. La sirène attendrie les regardait. Elle leur
dit alors :
- - Je crois qu’il y a une autre surprise qui
vous attend.
- - Ah bon ? Encore à manger ? fit la
poupée un peu étonnée
- - Non ! Autre chose ! Je crois qu’un
lutin vous a préparé un petit souvenir.
Les petites filles un grand
sourire aux lèvres et tapant dans leurs mains sautillaient d’impatience. Le
lutin leur remit le cadeau et sans un mot disparut dans les fourrés. Les deux
petites filles déchirèrent sans attendre le papier et défirent les nœuds des
rubans dorés qui l’entouraient. Elles
découvrirent alors un boitier avec sur le dessus un bouton en forme de sirène.
- Qu’est ce que c’est ? demandèrent en cœur
les deux sœurs
- - Une boite à commande de repas. Dès que vous
aurez faim, appuyez simplement sur ce bouton. Je saurai que vous avez faim et
je vous préparerai un bon repas. D’accord ?
- - Ouiiiii firent les deux sœurs en tapant dans
leurs mains. Merci beaucoup. C’est très gentil.
- - Je dois partir maintenant. J’ai d’autres
repas à préparer. A très bientôt Lena et Eline
- - Mais comment connais-tu nos prénoms ?
- - Chuuut ! C’est un secret. Dit le sirène
en souriant largement.
Elle fit une dernière
figure de saut périlleux et disparut sous l’eau. Les petites filles, encore éberluées de ce qu’elles avaient vécu
ce matin encore, rangèrent soigneusement le petit boitier avec leurs affaires,
elles décrochèrent la corde de la branche dans laquelle elle était fixée et
repartirent, laissant filer la barque sur le fil de l’eau.
Non loin de là, caché
derrière un gros rocher, le dauphin les observait en souriant.
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